Bruxelles ouvre la voie à la reconstruction en Syrie tout en maintenant la pression sur les violations des droits humains.
Après des années de restrictions économiques et diplomatiques, l’Union européenne a officiellement levé ses sanctions économiques contre la Syrie ce mardi. Une décision qui marque un tournant majeur dans la relation entre l’Europe et Damas, et qui fait écho à l’annonce similaire faite par les États-Unis la semaine dernière. À Damas, la décision est accueillie comme une victoire diplomatique et une opportunité historique.
La cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas, a justifié cette levée comme un geste politique fort : « Nous voulons aider le peuple syrien à reconstruire une nouvelle Syrie, inclusive et pacifique. » Derrière cette déclaration, plusieurs objectifs se dessinent : stabiliser le pays après plus d’une décennie de guerre civile, éviter que les puissances rivales ne monopolisent les opportunités économiques et poser les bases d’un retour à une coopération régionale plus fluide.
Avec cette décision, les restrictions sur les investissements, les importations de pétrole, les transactions bancaires, les exportations de biens de luxe et d’équipements énergétiques vont être levées. La Banque centrale syrienne pourra accéder à ses avoirs gelés, estimés à près de deux milliards de dollars.
En filigrane, l’Union européenne cherche également à ne pas laisser les États-Unis ou d’autres puissances rafler seuls les marchés de la reconstruction, estimés à plus de 400 milliards de dollars selon l’ONU. Bruxelles a déjà promis 2,5 milliards d’euros d’aide pour soutenir cette phase cruciale.
Toutefois, cette levée n’est pas totale. Les sanctions visant Bachar el-Assad et les responsables impliqués dans des crimes de guerre ou des violations des droits humains restent en vigueur. L’UE garde également la possibilité d’émettre des sanctions ciblées à l’avenir, notamment si des violences contre les minorités ou des atteintes au droit international sont constatées.
De plus, la crainte des sanctions américaines continue de peser sur les banques européennes. Si Washington a annoncé une suspension partielle des mesures contre la Syrie, celle-ci reste temporaire et ambiguë. « Les grandes banques internationales hésitent encore à reprendre les transferts, de peur d’un retour de bâton américain », explique Samir Aïta, président du Cercle des économistes arabes.
À Damas, les autorités parlent d’« une opportunité historique ». Le ministre syrien des Affaires étrangères a salué la décision européenne, estimant qu’elle permettrait de relancer l’achat de denrées essentielles blé, carburant, médicaments tout en facilitant la réhabilitation des infrastructures.
L’ouverture de l’UE pourrait aussi relancer la coopération sécuritaire sur les migrations, la lutte contre le terrorisme et le contrôle des frontières.