Vives tensions au centre du Mali, où une vingtaine de personnes sont portées disparues depuis une opération de l’armée malienne, lundi 12 mai, à Diafarabé. Cette localité, isolée entre les bras du fleuve Niger, est en émoi après l’interpellation d’hommes civils sur le marché local. Les familles, sans nouvelles depuis trois jours, redoutent le pire.
Selon plusieurs témoignages recueillis, des soldats maliens sont intervenus en fin de matinée, lundi, sur le marché aux petits ruminants de Diafarabé. Une trentaine d’hommes ont été arrêtés sur place. Une partie a été relâchée dans l’heure qui a suivi, mais les 27 autres – tous membres de la communauté peule – ont été conduits hors du village, en pirogue, vers la rive opposée, près du cimetière de Danguere Mamba.
Des témoins affirment avoir entendu des coups de feu peu après le départ des embarcations. Depuis, aucune nouvelle des disparus. L’armée, qui a mené cette opération seule, sans le soutien de ses alliés russes du groupe Wagner, n’a fourni aucun commentaire officiel.
Les proches des disparus assurent qu’il s’agit de commerçants et d’éleveurs, des civils sans lien avec les groupes jihadistes actifs dans la région. La zone est pourtant régulièrement ciblée par des attaques du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (JNIM), affilié à Al-Qaïda.
Mardi 13 et mercredi 14 mai, des manifestations ont eu lieu à Diafarabé. Une centaine de personnes ont exprimé leur colère et leur inquiétude face à ce qu’elles considèrent comme une opération arbitraire et discriminatoire. La population réclame la vérité sur le sort des hommes arrêtés.
Le silence des autorités maliennes alimente les craintes de disparitions forcées, voire d’exécutions extrajudiciaires. Les familles n’osent pas s’approcher de la zone où les militaires auraient conduit les détenus, de peur de représailles.
Cette affaire relance les accusations déjà portées contre l’armée malienne, accusée à plusieurs reprises d’exactions à l’encontre de civils, notamment peuls, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Dans un climat marqué par la méfiance et la peur, les appels se multiplient pour une enquête indépendante.