Du 26 au 28 juin 2025, la capitale togolaise a été secouée par des manifestations massives, violemment réprimées, qui ont mis en lumière une jeunesse en quête de changement. Si la colère porte d’abord sur la réforme constitutionnelle facilitant le maintien au pouvoir de Faure Gnassingbé, elle est nourrie aussi par un puissant sentiment de décalage. À quelques kilomètres de là, le Bénin de Patrice Talon incarne une trajectoire opposée celle d’un pays en transformation rapide.

Au cœur des rassemblements à Lomé, une phrase revient inlassablement :
« Si le Bénin a pu changer, pourquoi pas nous ? »

Depuis 2016, le président béninois Patrice Talon a entrepris une série de réformes économiques, institutionnelles et sociales qui ont modifié en profondeur le paysage de son pays. Routes modernisées, accès accru à l’électricité, amélioration du climat des affaires, lutte contre la corruption, et dynamisme culturel : le modèle béninois fait des émules, jusqu’au Togo.

« Regardez chez nos voisins : ils avancent. Nous, on piétine », s’indigne Kossi Albert, 30 ans, rencontré lors d’une marche à Lomé. Comme beaucoup d’autres jeunes Togolais, il exprime un profond désarroi face à un avenir qu’il juge bouché : chômage élevé, infrastructures vieillissantes, coupures d’électricité, libertés restreintes.

Cette situation alimente une grogne profonde, exacerbée par le projet de réforme constitutionnelle qui renforcerait encore le pouvoir de Faure Gnassingbé, déjà à la tête du pays depuis 2005, après 38 ans de règne de son père. Un « coup d’État institutionnel », dénoncent les manifestants, parmi lesquels plusieurs ont été tués lors des répressions. Amnesty International évoque trois morts, la société civile en recense au moins sept.

Sur les réseaux sociaux, les images des réussites béninoises circulent en boucle. Le contraste entre Cotonou et Lomé devient insupportable pour une génération qui n’a connu que le règne sans partage des Gnassingbé. Pour elle, le modèle Talon n’est plus seulement une source d’admiration : il devient un étalon, un reproche, une provocation.

La contagion de l’exemple béninois inquiète désormais jusqu’au sommet de l’État togolais. Mais dans les rues, un mot d’ordre s’installe : « Nous voulons notre propre transition. Le statu quo n’est plus acceptable. »

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