Alors que le Sénégal célèbre ce samedi 3 mai la Journée mondiale de la liberté de la presse, une vive polémique agite le paysage médiatique national. Le ministère de la Communication a récemment annoncé la suspension de 381 organes de presse pour non-respect des exigences administratives du Code de la presse. Une décision perçue par de nombreux professionnels comme une atteinte à la liberté d’informer.
Le directeur de la communication au ministère, Habibou Dia, se défend de toute volonté de répression. Il affirme que cette mesure vise à assainir un secteur qu’il qualifie d’« anarchique ». « Aujourd’hui, les acteurs parlent de fermeture de médias. Mais aucune entreprise n’a été fermée », a-t-il précisé, soulignant que les médias suspendus peuvent régulariser leur situation via une plateforme en ligne.
Mais cette justification ne convainc pas la profession. Mamadou Ibra Kane, président du patronat de la presse sénégalaise, dénonce un abus de pouvoir : « Si le ministre s’arroge le droit de dire qui est conforme ou pas, c’est une violation de la liberté de la presse. Ce n’est pas de sa compétence. »
Au-delà de la forme, c’est aussi le fond du Code de la presse – en vigueur depuis 2017 – qui est mis en cause. Pour Moussa Ngom, directeur d’un média d’investigation concerné par la mesure, « les critères sont dépassés ». Il plaide pour une réforme du texte avant toute sanction. « Si l’État veut sanctionner, que cela serve au moins à ouvrir les yeux sur l’inadéquation du code à la réalité actuelle », déclare-t-il.
À ce jour, une cinquantaine de médias ont été formellement notifiés de leur suspension. Le risque, selon les journalistes, est que cette démarche limite encore davantage la pluralité d’opinions et d’informations dans un pays longtemps salué pour son dynamisme médiatique en Afrique de l’Ouest.