Une bataille judiciaire s’ouvre au Mali, dix jours après la dissolution controversée des partis et associations politiques par les autorités de transition. Ce mercredi 21 mai, une dizaine d’anciens dirigeants de partis dissous ont saisi la justice pour contester cette décision qu’ils jugent anticonstitutionnelle. Une démarche inédite et stratégique, portée notamment par l’ancien ministre et avocat Mountaga Tall.
L’initiative se veut collective, mais les recours ont été déposés individuellement, en tant que « citoyens engagés », afin d’éviter les sanctions prévues contre toute activité menée au nom des organisations désormais interdites. « Nous étions une centaine à vouloir agir, mais nous avons restreint le nombre de requérants pour respecter les délais juridiques », explique l’un des initiateurs.
Plusieurs tribunaux de Bamako sont saisis pour contester « les effets » de la dissolution, dénonçant une atteinte grave aux libertés fondamentales : association, réunion et participation à la vie publique. Parallèlement, la section administrative de la Cour suprême a été sollicitée pour statuer directement sur la légalité du décret présidentiel.
Une stratégie pour mobiliser la Cour constitutionnelle
Les requérants espèrent que cette « saisine coordonnée » contraindra les juridictions à solliciter un avis de la Cour constitutionnelle. « Nul ne peut gouverner en dehors ou contre la Constitution, même en période de transition », déclare Mountaga Tall. « Le multipartisme et l’État de droit ne sont pas négociables. »
En parallèle, une plainte a été déposée contre deux membres du Conseil national de transition, accusés d’avoir proféré en ligne des appels à la violence contre les militants pro-démocratie. Ils sont visés pour « injures publiques, diffamation et menaces de mort » devant le pôle spécialisé anti-cybercriminalité.
Des chances minces, mais une volonté affirmée
Conscients que les chances d’obtenir gain de cause sont faibles, les plaignants affirment néanmoins vouloir « maintenir le débat » et « édifier l’opinion sur l’illégalité » de la mesure. « Nous savons que cette guerre est d’usure, mais elle est juste », confie un ancien ministre impliqué.
Plusieurs intellectuels ont par ailleurs publié une tribune pour « la préservation de la République », tandis que des voix s’élèvent sur les réseaux sociaux pour dénoncer un recul démocratique.