Alors que la convocation du corps électoral est imminente pour la présidentielle d’octobre, le site internet d’Elections Cameroon (Elecam), l’organe en charge de l’organisation des scrutins, est inaccessible depuis plusieurs semaines. Une situation qualifiée de « regrettable » par le parti au pouvoir, mais jugée « inquiétante » et « suspecte » par l’opposition et la société civile.
Depuis la mi-mai, les citoyens camerounais ne peuvent plus accéder à elecam.cm, ni à la page permettant de vérifier leur inscription sur les listes électorales. Officiellement, Elecam évoque une « maintenance », sans préciser de calendrier de rétablissement. Une justification jugée peu convaincante à l’approche d’un scrutin crucial pour l’avenir du pays.
« Il y a des informations que nos militants attendaient, et ce n’est pas le cas », reconnaît Patrick Rifoe, communicant du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC). « C’est une situation qui cause préjudice à tous les acteurs politiques. Nous faisons contre mauvaise fortune bon cœur. »
Mais du côté de l’opposition, le ton est tout autre. Pour Joseph-Emmanuel Ateba, secrétaire national à la communication du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC), ce blocage numérique est révélateur :
« C’est la preuve qu’Elecam n’est pas indépendant. Ils empêchent délibérément les citoyens d’accéder à leurs données pour masquer la fraude. »
La société civile, elle aussi, s’inquiète. Pour Philippe Nanga, directeur exécutif de l’ONG Un Monde Avenir, le contexte de désinformation rend cette inaccessibilité d’autant plus problématique :
« Ce genre de panne qui dure plusieurs semaines crée un vide dangereux. Il faut un espace officiel où chercher la bonne information, pour éviter la manipulation de l’opinion. »
En mars dernier, l’ingénieur Remi Tassing, membre du mouvement Stand Up For Cameroon, alertait déjà sur les failles de sécurité entourant les données personnelles des électeurs. Un signal d’alarme qui, aujourd’hui, résonne comme un avertissement ignoré.