Le suspense reste entier à quelques jours d’un scrutin décisif pour l’avenir de la première institution financière panafricaine. Le jeudi 29 mai, les 81 actionnaires de la Banque africaine de développement (BAD) se réuniront à Abidjan pour désigner le successeur du Nigérian Akinwumi Adesina, qui s’apprête à quitter ses fonctions après deux mandats marqués par une expansion significative du rôle de la banque sur le continent.
Cinq candidats sont en lice, chacun porteur d’une vision pour une Afrique en pleine mutation, confrontée à des défis immenses mais aussi à des opportunités sans précédent.
Ancien ministre sénégalais de l’Économie et ex-vice-président de la BAD, Amadou Hott incarne la continuité doublée d’une ambition renouvelée. À 52 ans, il veut faire de la banque le fer de lance du financement des grands projets d’infrastructure. Son parcours allie technocratie et diplomatie économique, deux atouts dans une compétition où l’expérience au sein de l’institution compte.
Représentant de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), le Zambien Samuel Munzele Maimbo mise sur son long passage à la Banque mondiale pour séduire les actionnaires. Il plaide pour une intégration économique accrue à travers la suppression des barrières intra-africaines et le développement des secteurs agricoles et culturels. À 52 ans, il entend renforcer l’impact de la BAD sur le terrain.
Le Mauritanien Sidi Ould Tah, 60 ans, s’appuie sur son bilan à la tête de la Banque arabe pour le développement en Afrique (Badea), où il a réussi à mobiliser massivement les financements venus du Moyen-Orient. S’il est élu, il veut formaliser l’économie informelle et encourager l’innovation financière pour élargir les sources de capitaux.
Ancien gouverneur de la BEAC, le Tchadien Abbas Mahamat Tolli, 53 ans, met en avant sa capacité à rétablir les équilibres macroéconomiques dans un contexte régional souvent instable. Ses priorités : sécurité alimentaire, infrastructures, gouvernance et développement des marchés financiers africains.
Candidate de l’Afrique du Sud, Bajabulile Swazi Tshabalala a été vice-présidente de la BAD jusqu’en 2024. Forte d’une double expérience dans le secteur privé et au sein de l’institution, elle propose de consolider les acquis tout en accélérant la mise en œuvre des stratégies existantes, avec un fort accent sur le partenariat public-privé.
Pour l’emporter, un candidat devra convaincre à la fois le collège africain (60 % des droits de vote) et l’ensemble des actionnaires – y compris les pays non africains comme les États-Unis, le Japon ou la France. Le Nigeria, premier actionnaire africain, et les États-Unis, poids lourd non régional, seront particulièrement scrutés. Des tractations en coulisses sont d’ores et déjà en cours.
Le nouveau président ou la nouvelle présidente prendra ses fonctions en septembre 2025, avec pour mission d’amplifier le rôle de la banque dans un continent en quête d’industrialisation, de résilience climatique et d’emploi pour sa jeunesse. À l’heure où la concurrence pour les capitaux s’intensifie, la BAD est appelée à jouer un rôle catalyseur plus déterminant que jamais.